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COMEDIE MUSICALE: DEFINITION




"Comédie musicale", un terme assez vaste qui prête souvent à confusion. Si la tendance actuelle est d’utiliser cette terminologie pour définir tout film ou spectacle comportant des scènes musicales, ce genre est en réalité bien plus codé. Retour sur les éléments sémantiques et narratifs récurrents d’un genre cinématographique mal connu.


AVANT-PROPOS

Avant de nous aventurer dans une tentative de définition de la comédie musicale, notons tout d’abord qu’il n’existe pas de définition générale récursive d’un genre cinématographique[1] à proprement parler. Un genre cinématographique est une catégorie empirique qui sert à nommer, classer, distinguer des œuvres filmiques contenant à la fois un même ensemble d’éléments sémantiques et une structure narrative commune dans laquelle ces éléments s’insèrent. Cependant, il ne faut pas considérer un genre comme une boîte étanche dans laquelle on rangerait un groupe de films. Les genres ne sont pas fixes, ils ne cessent d’évoluer, de s’éteindre, de ressusciter, non seulement à chaque nouveau film produit, à chaque nouveau genre mis en place, mais également en fonction du contexte socio-économique et spatio-temporel. Les limites entre les différentes catégories génériques et leurs degrés de précision sont donc très variables. De même, il ne faut pas considérer les genres comme des structures textuelles, des modèles d’écritures prédéfinis auxquels se conformeraient les réalisateurs et producteurs pour créer leurs films. De par sa dialectique de standardisation (répétition de traits caractéristiques) / innovation (variation de et autour de ces traits), le genre cinématographique s’apparente à une formule communicative qui permet aux créateurs de fournir aux spectateurs un contexte d’interprétation du film à la fois structuré et ouvert. Le genre organise ainsi chez le spectateur des attentes basées sur sa connaissance générique, qui seront mises à l’épreuve lors de la vision du film. La définition de la comédie musicale à suivre n’est donc en aucun cas exclusive et aura principalement une fonction de guide pour aborder les différentes œuvres de ce dossier.


DEUX TEMPS TROIS MOUVEMENTS

La première grande caractéristique de la comédie musicale se trouve dans son montage bien particulier d’alternance entre scènes dialoguées et instants musicaux (qu’ils soient chantés et/ou dansés). Ainsi, ne sont pas considérés comme appartenant à la comédie musicale les films chantés de bout en bout (Les Parapluies de Cherbourg, Evita) ou ne contenant qu’un ou deux morceaux musicaux (Alison Forever, Beetlejuice), même si ces séquences utilisent d’autres éléments caractéristiques du genre. Une comédie musicale joue sans cesse sur le rapport entre les différentes parcelles qui la composent, développant un réel art de la transition. L’élément servant de liant entre musical et non-musical prend généralement deux formes. S’il se base régulièrement sur un prétexte scénaristique - une représentation scénique (la plupart des séquences musicales de Cabaret, Hindi Sad Diamonds dans Moulin Rouge!), une façon de réconforter un ami (Make Them Laugh dans Chantons sous la pluie), la reprise en cœur d’une chanson populaire (Meet Me in Saint Louis dans Le Chant du Missouri), une fête (les mariages de De-Lovely ou Brigadoon, le bal de Noël de Tout le monde dit I love you), etc. – il est souvent bien plus subtil et travaillé. Ne cherchant pas à justifier la présence d’une scène musicale, il laisse les mouvements et la musique parler d’eux-mêmes. On retiendra par exemple la démarche déambulatoire de Fred Astaire et Cyd Charisse qui, au son d’un orchestre lointain jouant dans le Park, se transforme peu à peu en pas de deux romantique lors du Dancing in the Dark de Tous en scène.


De ce premier code de l’alternance, et donc du travail de la transition, découle le second élément caractéristique du genre: un rapport d’interdépendance entre les mouvements des personnages et leur environnement sonore. Contrairement aux scènes dialoguées dans lesquelles son et musique servent d’habillement, ou sont le résultat d’actions produites par les personnages, dans les scènes de comédie musicale, les éléments sonores prennent quelques instants les commandes, comme s'ils dirigeaient désormais les mouvements et les paroles des protagonistes. La musique, créatrice de l’action, naît des bruits de la vie courante (un coup de tonnerre déclenche la mélodie du pas de deux Lovely Day entre Ginger et Fred dans Le Danseur du dessus, les bruits de machinerie emportent Selma dans ses rêveries dans Dancer in the Dark), des paroles ou des sons émis par les acteurs (la répétition des phrases de l’orthophoniste donne la cadence de Moses Supposes dans Chantons sous la pluie, les onomatopées des détenues du muderer’s row rythment le Cellblock Tango de Chicago), les emportant dans des séquences remarquables de danse et/ou de chant. L’une des meilleures représentations de cette interaction son/mouvement reste certainement l’utilisation des claquettes: les pas produisent la rythmique musicale sur laquelle l’acteur danse, créant un cercle infini, proche parent de la poule et de son œuf. Ne jouant pas sur cette notion d’interaction, les adaptations d’opéras et leurs dérivés (Carmen, Madame Butterfly), ainsi que les films mettant en scène des chanteurs ou des danseurs (Walk the Line, Flashdance), ne sont pas considérés comme des comédies musicales.


I HOPE YOU DON’T MIND THAT I PUT DOWN IN WORDS

Les scènes musicales qui résultent de cette alternance et laissent régulièrement à la musique le soin de diriger les mouvements, deviennent éléments moteurs indispensables, pivots autour desquels se nouent les intrigues, vertèbres s’emboîtant pour construire la colonne du film. Si la première séquence musicale du film est généralement celle qui en fixe l’enjeu (de Dorothy qui chante une contrée imaginaire au-delà de l’arc-en-ciel avant de se retrouver au pays d’Oz, aux parents d’élèves qui tremblent de frayeur devant les méfaits de la marijuana présentés par un film de propagande dans Reefer Madness), les suivantes servent à en coudre la trame. Certains diront que cette mise en scène récurrente de chorégraphies millimétrées et tours de chant parfaits, sortis d’on ne sait où et souvent interprétés en nombre comme par magie, touche à de la pure invraisemblance. Pourtant c’est bien du réel dont s’inspirent ces séquences; elles laissent transparaître à l’écran les émotions des personnages, leurs envies, leurs états d’âme. La comédie musicale a cette particularité de révéler au public, par le biais de cette conjonction artistique aux apparences irréelles, ce qui d’habitude reste caché ou nécessite de longs dialogues/monologues, des explications lourdes de sens, des lettres laissées au coin d’une table, ou une voix-off parfois maladroite. Danse et chant deviennent alors à la fois des catalyseurs de sentiments destinés à renseigner le spectateur et faire avancer l’intrigue, mais également des outils cathartiques intradiégétiques, défouloirs physiques et spirituels pour des personnages qui ne nient jamais avoir entonné quelques notes ou esquissé des pas de danse.


IT TAKES TWO TO TANGO

De ces divers codes, issus de la comédie musicale scénique, est née une structure narrative basée sur une double dualité: sexuelle et sociale. En effet, le genre met généralement en scène des intrigues tournant autour du jeu amoureux entre un homme et une femme devant faire face à des barrières sociales pour faire vivre leur couple pleinement. Ces barrières peuvent être de formes multiples: différence de classe (Le Pirate, Un Américain à Paris) et ses dérivés aux allures de guerre des gangs (West Side Story, Grease), différence d’âge ou de génération (Tous en scène, Brigadoon), la concurrence artistique (There’s No Business Like Show Business, Une étoile est née), l’interférence d’un troisième larron (Chantons sous la pluie, Moulin Rouge!), et souvent des quiproquos, malentendus ou traits du destin toujours remis à leur place en fin de course (Le Danseur du dessus, Le Chant du Missouri, Reefer Madness). Des barrières qui souvent s’accumulent pour compliquer un peu plus la romance des tourtereaux. Si ces structures narratives sont pléthores dans le milieu de la comédie musicale, elles ne sont bien évidemment pas les seules mises en œuvre. Certains dérivent de cette base triturant le code de la dualité sexuelle. Par exemple, Chicago propose un duo exclusivement féminin, Rent multiplie les couples et les identités sexuelles, Cabaret ou De-Lovely jouent sur le triangle amoureux, Hair, Hair Spray ou La Mélodie du bonheur captent les moments de vie d’un groupe socialement défini. Ces variations thématiques dans les structures narratives vont amener certains analystes du genre à identifier des sous-genres[2] dans la comédie musicale.


TRIPLETS

Dans son ouvrage La Comédie musicale hollywoodienne[3], Rick Altman propose trois sous-genres: la comédie-spectacle, la comédie-conte de fées et la comédie-folklore. Le premier sous-genre regroupe les films dont l’action se déroule dans le milieu du spectacle, en montre les coulisses comme par exemple Babes on Broadway, Tous en scène ou There’s No Business Like Show Business. Ce sous-genre a été depuis toujours le plus couramment utilisé dans l’histoire de la comédie musicale. Le sous-genre de la comédie-conte de fées rassemble quant à lui les comédies musicales dont le scénario se base sur un conte ou un roman merveilleux célèbre ou possède une structure typique de conte: ouverture sur une formule du type "Il était une fois" et mise en scène d’éléments, de personnages féeriques ou magiques. On peut retenir dans ce sous-genre les adaptations de Peau d’âne par Jacques Demy ou Le Magicien d’Oz par Victor Flemming, ou encore Brigadoon de Vincente Minnelli qui, s’il n’est pas une adaptation, possède de nombreux éléments féeriques, à commencer par ce village magique qui n’apparaît que tous les cent ans. Enfin le dernier sous-genre regroupe des comédies musicales dont l’intrigue "nous plonge dans une époque, un pays, une culture, s’exprimant par une musique qui semble en être l’expression naturelle et collective" pour reprendre les mots de Michel Chion[4]. Dans cette catégorie on retrouve des films comme Le Violon sur le toit ou West Side Story. Bien sûr ces sous-genres sont perméables, un même film pouvant appartenir à deux ou aux trois d’entre eux comme Brigadoon , à la fois comédie-conte de fées et comédie-folklore.








[1] Ce paragraphe sur le genre cinématographique se base sur la lecture de l’ouvrage Les Genres du cinéma, Raphaëlle MOINE, Nathan Cinéma, Lassay-les-Châteaux, 2002.
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[2] Il ne faut pas confondre, dans l’évolution des genres cinématographiques, les sous-genres et les cycles. Contrairement aux cycles qui proposent une diversification momentanée du genre, les sous-genres se manifestent tout au long de l’histoire d’un genre et résultent d’un traitement particulier de sa formule générique.

[3] Rick ALTMAN, La Comédie musicale hollywoodienne, Armand Colin, Paris, 1992.

[4] Michel CHION, La Comédie musicale, Cahiers du cinéma, collection Les petits cahiers, Neuilly-Plaisance, 2002, p. 10




 
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