UN TRIOMPHE ROUMAIN
Cannes, 60e, clap de fin. La fête cinéphile s’est achevée dimanche soir par un palmarès dans la lignée de la compétition officielle, équilibrée et de bonne facture. Si quelques grands films ont été oubliés par Stephen Frears et son jury, personne ne contestera les deux principaux prix, la Palme d’Or au cinéaste roumain Cristian Mungiu pour 4 Mois, 3 semaines et 2 jours et le Grand Prix du jury à La Forêt de Mogari de Naomi Kawase.
LA PALME ATTENDUE
Favori de la presse, le beau film de Cristian Mungiu, 4 Mois, 3 semaines et 2 jours a donc reçu la Palme d’Or du 60e Festival de Cannes des mains du président du jury, le cinéaste anglais Stephen Frears. Une récompense somme toute logique pour ce film impressionnant de maîtrise qui raconte le difficile avortement d’une jeune fille sous la dictature de Ceaucescu. Ancien assistant de Bertrand Tavernier, le « Dardenne » des Carphates pratique Un cinéma rugueux et efficace, parfois démonstratif avec notamment un glaçant usage du son lors de la séquence finale. La Palme d’Or souligne aussi l’émergence du cinéma roumain sur la scène internationale après les prix reçus par La Mort de Dante Lazarescu et 12h08 à l’est de Bucarest. D’un point de vue géographique, le palmarès fait d’ailleurs la part belle aux cinématographies en vogue avec des prix pour le cinéma coréen (prix de l’interprétation féminine pour l’épatante héroïne de Secret Sunshine), allemand (le scénario pour Fatih Akin et De l’autre côté) ou mexicain (prix du jury pour l’exigeant Lumière silencieuse) de Carlos Reygadas.
UN PALMARES CONSENSUEL
Plus réjouissant encore, le Grand Prix du jury remis à Naomi Kawase pour la sublime Forêt de Mogari célèbre un cinéma contemplatif et intimiste, doux et sensible. La standing ovation réservée au film lors de sa présentation en compétition officielle n’était pas un leurre. La réalisatrice japonaise confirme son don entrevu déjà dans Suzaku et Shara. Le Grand Prix du jury salue aussi le travail de producteur défricheur de Celluloid Dreams. Outre les deux prix déjà précités, celui du jury ex-aequo à Persepolis sied à merveille au film d’animation autobiographique de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud. L’excellent accueil reçu à Cannes préfigure sans doute une grande carrière en France et à l’étranger pour cette œuvre originale et personnelle. En revanche, le prix de la mise en scène attribuait à Julian Schnabel dénote singulièrement. Si Le Scaphandre et le papillon n’est pas dépourvu de qualités artistiques, la concurrence était rude et impitoyable pour l’auteur de Basquiat. Les absences conjuguées de James Gray (La Nuit nous appartient), David Fincher (Zodiac) et des frères Coen (No Country for Old Men) tiennent de la mauvaise plaisanterie. Même avec des films mineurs, Wong Kar-waï (My Blueberry Nights) et Quentin Tarantino (Le Boulevard de la mort) restent des maîtres pour l’élève Schnabel. Tout aussi surprenant, le prix de l’interprétation masculine décerné à Konstantin Lavronenko pour Le Bannissement. Javier Bardem (No Country for Old Men) oubliera la Croisette lors de la prochaine cérémonie des Oscars…
La 60e édition du Festival de Cannes est à peine terminée que déjà se prépare la suivante. Les dates ont déjà été fixées et le prochain rendez-vous cinéphile se tiendra du mercredi 14 au dimanche 25 mai 2008. Déjà quelques noms sont annoncés. Le Film Français évoque notamment le nouveau Abbas Kiarostami avec Juliette Binoche dans le rôle principal ou encore le film du réalisateur de Los Muertos Lisandro Alonso (Liverpool). Après un rapide tour d’horizon des différents projets des habitués de la Croisette, on peut cocher les noms de Turc Nuri Bilge Ceylan, pour un film policier intitulé Daydreams, Fernando Meirelles (Blindness), Wim Wenders (Palermo Story) ou encore David Cronenberg (Eastern Promises)… Et de rêver d’une projection exceptionnelle d’Indiana Jones IV de Steven Spielberg si le film est fini à temps…
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